Anton Bruckner
Locus iste (Ce lieu a été créé par Dieu), WAB 23, est un motet composé par Anton Bruckner en 1869 pour la dédicace de la chapelle votive de la nouvelle cathédrale de Linz.
Le texte latin Locus iste est la graduel de la messe pour la Kirchweih, l'anniversaire de la dédicace d'une église. Le texte, concentré sur le concept d'endroit sacré, est basé sur l'histoire Biblique de l'échelle de Jacob, où Jacob disait « Certainement, l'Éternel est en ce lieu et je ne le savais pas » (Genèse, 28:16), et le récit du buisson ardent où il disait à Moïse « Retire tes chaussures de tes pieds, car le lieu sur lequel tu te tiens est une terre sainte » (Exode, 3:5).
Le motet en ut majeur de 48 mesures est conçu pour chœur mixte a cappella. Sa durée d'exécution est d'environ trois minutes.
Bruckner a composé les trois lignes de texte en forme « ABA » terminée par une coda, « A » contenant la première ligne du texte et assurant l'encadrement des deuxième et troisième lignes. Pierre Strasser suggère que la composition reflète des éléments d'architecture, comme dans la symétrie de la forme da capo et l'utilisation de motifs comme des blocs de construction.
Le motet en Allegro moderato commence tranquillement en homorythmie. Max Auer note que l'œuvre a des accointances avec l'Ave verum de Mozart. A. Crawford Howie indique par ailleurs qu'elle « commence très mozartienne mais se poursuit par des progressions typiquement bruckneriennes ». La répétition de la première ligne, à partir d'une note plus haute, est marquée mf, confirmant a "Deo factus est" plus haut et plus fort, puis en le répétant plus doucement. La basse commence chaque "a Deo factus est". Le musicologue Antoine Tailleur note ici, comme dans beaucoup de motets de Bruckner, « l'isolement de la partie des basses à des moments structurellement importants ». Les basses commencent aussi la deuxième phrase de texte avec un nouveau motif ascendant, marqué f, les autres voix suivent en homorythmie. La ligne est répétée comme une séquence plus haut, marquée ff. Après une pause d'une demi-mesure, les ténors seuls commencent soudain en pp la section du milieu, sur une note répétée, imitée par les sopranos et les altos. Tout au long de cette section, seules les voix supérieures, sans les basses, chantent de façon chromatique sans tonalité stable, dans un crescendo progressif jusqu'au mf. Iso Camartin note dans un article consacré à l'œuvre dans la Neue Zürcher Zeitung : das unanfechtbare Geheimnis (l'irréprochable mystère) apparaît comme unfassbar (incompréhensible) et beunruhigend (inquiétant), décrit par Ryan Turner comme un « chromatisme transparent ».
Après une pause d'une demi-mesure le début est repris. A la mesure 40 factus est est remplacé par Deo sur lequel Bruckner nous offre le seul mélisme de cette composition sinon austère et strictement syllabique. L'auteur du programme pour un CD de l'Oratorio Society de New York CD qui inclut le motet note que le mélisme « tisse un charme éthéré ». Elle mène à une longue pause générale, atteinte « prudemment via cinq mesures », avant de répéter une dernière fois "a Deo, Deo factus est" et de conclure « paisiblement et sereinement ». L'auteur conclut en affirmant que le « Locus iste est une composition envoûtante qui rappelle le calme de la chapelle qu'elle honore ». Écrivant pour Gramophone, Malcolm Riley la décrit « sublime (et trompeusement difficile) ».
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